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De 10 h à 13 h (54 bd Raspail 75006 Paris), cf. calendrier des séances et salles ci-dessous
Quelle place revient au discours juridique dans la réflexion que les sociétés entretiennent sur elle-même ? Si seule une approche culturelle du droit promet de répondre à cette question – dégageant momentanément les juristes de l’obligation que la société leur fait de doubler l’activité des magistrats – il ne suffit pas, pour la trancher, de mesurer la « force » du droit. Il faut encore s’entendre sur l’usage, l’effet et le comportement des « formes » qui sont le premier résultat du pouvoir d’invention des juristes.
Pour contribuer à cette analyse, le séminaire se propose de cerner la manifestation historique de cette invention, qui se présente objectivement comme une "intervention" sur la langue du droit. En croisant plusieurs niveaux d’analyse chronologiques, il s’agira d’abord d'interroger la pertinence, s'agissant du droit occidental, du grand partage appelé à séparer les Anciens (romains ou médiévaux) des Modernes (révolutionnaires ou réactionnaires). En considérant le rapport du droit à la philosophie, à la littérature ou à l’architecture, il s’agira ensuite de multiplier les points d’observation sur le phénomène, réel ou supposé, de l'isolement d’un « monde du droit ».
Directeur d’études invité en 2019, Jesus Rodriguez Velasco (Columbia University, NYC) abordera deux sujets, chacun sur deux séances :
1. Écritures marginales : espaces et hiérarchies des écritures juridiques médiévales
2. Historicité des fictions. Le droit, la littérature et la création de la vérité
Mots-clés : Architecture, Culture, Culture visuelle, Droit, normes et société, Ecclésiologie, Fiction, Histoire culturelle, Histoire du droit, Histoire intellectuelle, Littérature,
Aires culturelles : Europe,
Suivi et validation pour le master : Bi/mensuel annuel (24 h = 6 ECTS)
Domaine de l'affiche : Droit et société
Intitulés généraux :
Renseignements :
contact par courriel.
Direction de travaux d'étudiants :
sur rendez-vous par courriel.
Site web : http://contethevenin.blogspot.com/
Adresse(s) électronique(s) de contact : emanuele.conte(at)uniroma3.it
Rassemblant une dizaine d’auditeurs réguliers, venus de la philosophie, de l’histoire, du droit ou de la psychanalyse, le séminaire a proposé de combiner deux séries d’approches de la notion de forme juridique, entendue comme premier résultat d’un pouvoir d’invention des juristes. Croisant les ressources conceptuelles de la philosophie et de la philologie juridique, nous avons tiré le fil de la référence au droit médiéval – entendu tour à tour comme matrice des systèmes juridiques occidentaux, comme moment clé de la transmission du patrimoine normatif romain dans la modernité et comme arrière-plan littéraire de l’édification des grands systèmes de pensée juridique hérités du XIXe siècle – pour tenter de saisir l’efficacité pratique, l’effet culturel et le comportement historique des « formes juridiques ».
La séance introductive a été l’occasion de situer notre thèse d’une historicité de l’invention juridique dans le paysage actuel de l’histoire du droit, tiraillé entre une approche dogmatique, centrée sur le réglage logique des « idées » juridiques et une veine historique, qui tend à aligner tour à tour l’histoire de la pensée juridique sur la chronologie de l’histoire socio-politique ou sur la transmission des textes.
La deuxième séance est revenue sur la caractérisation de la rationalité juridique comme rationalité formelle, en resituant la sociologie du droit de Weber dans le contexte de son dialogue avec les juristes allemands de veine dogmatique, mais aussi de son rapport à l’analyse de l’économie médiévale.
Centrée sur deux analyses de cas, la troisième séance a tenté d’illustrer les opérations, raisonnements et pratiques associés à l’invention de deux « formes » nouvelles par les juristes médiévaux, glossateurs puis commentateurs du droit civil : le domaine divisé, d’une part, dont nous avons analysé la première occurrence chez Pilius ; la règle de droit, d’autre part, définie par Bulgarus sur la base d’une lecture erronée d’une source romaine.
Pour analyser ces deux cas, la quatrième séance a proposé d’utiliser l’idée « d’activation » mise en avant par Nelson Goodman en philosophie de l’art. En distinguant cette notion de celle d’application (d’une règle) et d’allégation (d’un texte), nous avons discuté la pertinence de son importation dans la théorie du droit.
Nous avons ensuite analysé les effets historiographiques de notre attention aux « formes », en revenant d’abord sur l’analyse schmittienne du dominium mundi, que nous avons contrastée avec l’occurrence de l’idée dans le De iure fisci de Roland de Lucques (séance 5) puis sur la représentation de l’époque médiévale comme un âge d’or des communs, c’est-à-dire de formes de jouissance partagée développées indépendamment de la propriété (séance 6).
Les quatre dernières séances ont proposé d’analyser la prégnance ou au contraire l’effacement des formes juridiques dans la codification d’Alphonse le Sage, spécialement les Siete Partidas, dans lesquelles notre invité Jesus Rodriguez Velasco nous a montré l’absorption de la rationalité juridique formelle dans la perspective plus ample, pétrie de théologie juive et arabe, d’une « science de l’âme ».
Dernière modification de cette fiche par le service des enseignements (sg12@ehess.fr) : 10 avril 2019.