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2e et 4e jeudis du mois de 17 h à 20 h (salle AS1_08, 54 bd Raspail 75006 Paris), du 10 janvier 2019 au 23 mai 2019. Pas de séance le 11 avril. Séance supplémentaire le 16 mai, même heure (salle 9, 105 bd Raspail 75006 Paris)
En dépit de leurs ambiguïtés et des controverses politiques qu’elles suscitent, les notions de radicalité et d’extrémisme traversent aujourd’hui des questionnements fort nombreux sur l’islam, en particulier en France. Pour une deuxième année, ce séminaire vise à élargir le débat en l’ouvrant à des pays africains et asiatiques. L’objectif n’est pas seulement d’interroger des paradigmes qui privilégient trop souvent une approche globale au détriment de l’étude des contextes locaux. Il est aussi de questionner la circulation des idées islamiques, leur rôle dans les mobilisations sociales et leur rapport à la violence et au pouvoir politique, y compris dans une perspective historique et anthropologique. Pour cela, les réflexions développées au cours du séminaire s’attacheront à décrypter la complexité et la fluidité des différents courants de pensée qui animent à présent les croyants musulmans en Afrique et en Asie. Un tel travail mettra en évidence les limites d’une vision qui s’inspire souvent du vocabulaire colonial, opposant, par exemple, un islam « noir », traditionnel et tolérant à un islam arabe, exogène et « radical ». Le renouvellement de nos questionnements permettra également de déconstruire les catégories habituellement utilisées par les spécialistes de la contre-insurrection et de la lutte antiterroriste qui veulent « dé-radicaliser » les esprits : soufisme, wahhabisme, salafisme, sunnisme, chiisme, mahdisme, millénarisme, etc.
Pour cela, le séminaire adoptera trois principaux points de vue :
Jeudi 10 janvier 2019 : Gabriel Facal (chercheur postdoctorant au CASE), « Un tournant salafiste en Indonésie ? Comment le recentrement à droite des normes et des valeurs religieuses redéfinit les contours de l’extrémisme islamiste »
Jeudi 24 janvier 2019 : Fatiha Dazi-Héni (Institut de recherche stratégique de l'École militaire (IRSEM) et IEP de Lille), « Que reste-t-il de l’islam wahhabite dans le projet de la construction d'un État-nation saoudien ? »
Jeudi 14 février 2019 : Bayram Balci (directeur de l'Institut français d'études anatoliennes), « Du piétisme au politique, quelles transformations du mouvement de Fethullah Gûlen ? »
Jeudi 14 mars 2019 : Marc-Antoine Pérouse de Montclos (IRD-CEPED), « L’Afrique : dernière frontière du djihad ? »
Jeudi 28 mars 2019 : Mohamed Kerrou (Université de Tunis El-Manar), « L’islam dans l’espace public en Tunisie : visibilités et débats de société »
Jeudi 9 mai 2019 : Roman Loimeier (Université de Göttingen), « Radical Islam in Contemporary Subsaharan Africa »
Jeudi 16 mai 2019 (salle 9, 105 bd Raspail 75006 Paris) : Wael Garnaou i (octorant en psychanalyse et psychopathologie, Université Sorbonne Paris Cité - Paris 7), « Migrations maghrébines en terre de djihad »
Jeudi 23 mai 2019 : Hannah Höchner (University of East Anglia), « Qur’anic schools in northern Nigeria: fair game for unfair accusations »?
Mots-clés : Anthropologie, Anthropologie historique, Anthropologie sociale, Ethnographie, Ethnologie, Fait religieux, Globalisation, Histoire, Histoire des idées, Islam, Religieux (sciences sociales du), Sociologie politique,
Aires culturelles : Afrique, Arabe (monde), Asie, Musulmans (mondes),
Suivi et validation pour le master : Bi/mensuel annuel (24 h = 6 ECTS)
Intitulés généraux :
Centre : IIAC-LAIOS - Laboratoire d'anthropologie des institutions et des organisations sociales
Renseignements :
contacter les enseignants par courriel.
Direction de travaux d'étudiants :
sur rendez-vous pris par courriel auprès des enseignants.
Réception :
sur rendez-vous pris par courriel auprès des enseignants.
Niveau requis :
Licence.
Site web : http://imaf.cnrs.fr/spip.php?article71
Adresse(s) électronique(s) de contact : dawod.hosham(at)gmail.com, Marie.Miran(at)ehess.fr, marc-antoine.perouse-de-montclos(at)ird.fr
Lancé en 2017-2018, ce séminaire s’est proposé pour une deuxième année en 2019, de revisiter les notions de « radicalité » et d’« extrémisme » en islam, galvaudées par les controverses en Europe et en Amérique du Nord, en élargissant et en décentrant le débat à des pays africains et asiatiques. Son ambition première a été d’interroger des paradigmes qui privilégient trop souvent une approche globale au détriment de l’étude des contextes locaux. Ainsi les catégorisations d’auto- ou d’exo-présentation de soi et des autres, construites de manière endogène, souvent fluide et évolutive, ont-elles été privilégiées au détriment des catégories plus normatives relevant du vocabulaire colonial ou de la taxonomie des spécialistes de la contre-insurrection et de la lutte antiterroriste. Les approches empiriques, articulées aux terrains d’enquêtes, notamment ethnographiques et sociohistoriques, ont été privilégiées pour rendre compte des évolutions polysémiques des sociétés et des cultures musulmanes d’Afrique et d’Asie contemporaines. La deuxième ambition du séminaire a été de questionner la circulation des idées islamiques – notamment des différents modèles de réforme islamique –, leur rôle dans les mobilisations sociales et leur rapport à la violence et au pouvoir politique, dans une dimension trans-locale voire trans-continentale Afrique-Asie. Pour ce, le séminaire s’est penché sur la mobilité des musulmans (mobilité économique, éducative, pour le(des) pèlerinage(s), etc.) et les moyens de communication (relevant des anciennes et des nouvelles technologies), en interrogeant les appropriations et les acculturations qui ont pu y avoir partie liée.
Trois séances ont porté sur divers contextes asiatiques : péninsule arabique, Turquie et Asie du Sud-Est. Fatiha Dazi-Héni a tracé un portrait historique de l’islam wahhabite pour interroger ce qu’il en reste dans le projet en cours de construction d’un État-nation saoudien. Bayram Balci a présenté une synthèse de ses longues années de recherche sur le mouvement Fethullah Gûlen et sa progressive transformation du piétisme au politique, ayant provoqué sa répression en Turquie et dans de nombreux pays notamment asiatiques et africains dans lesquels il était implanté. Gabriel Facal a décliné les facettes du tournant salafiste extrémiste de l’islam en Indonésie qu’il qualifie de « déplacement à droite » des normes et des valeurs religieuses.
Deux séances ont été consacrées à la Tunisie. Mohamed Kerrou, professeur invité de l’Université de Tunis El-Manar, est revenu sur la question de l’islam dans l’espace public en Tunisie, pays longtemps perçu comme l’un des plus « séculiers » du monde arabe (sous la présidence de Bourguiba) et des plus répressifs à l’encontre des mouvements islamistes (sous celle de Ben Ali). Wael Garnaoui a présenté ses enquêtes en psychologie sur les migrations maghrébines en terre de djihad pour comprendre l’énigme apparente du hiatus entre l’initiative populaire d’un printemps arabe dont les acquis ont été stabilisés et un nombre record de c.5000 départs de jeunes Tunisiens en territoire de Daech (plaçant la Tunisie en tête de liste pour la « production » de djihadistes proportionnellement à sa population totale).
Enfin, trois séances ont été consacrées à l’Afrique subsaharienne. Dans deux synthèses magistrales, Marc-Antoine Pérouse de Montclos, formé en science politique, et Roman Loimeier, formé en anthropologie – mais tous deux versés dans la pluridisciplinarité – ont présenté leurs derniers ouvrages de synthèse sur la question du radicalisme et du djihadisme en contexte africain (respectivement L’Afrique : dernière frontière du djihad ? et Radical Islam in Contemporary Subsaharan Africa). Dans une dernière séance en anglais, Hannah Höchner a présenté ses recherches sur les écoles coraniques (makaranta schools) au Nord Nigeria pour démentir les raccourcis souvent établis entre ces élèves (almajirai) et les recrues du mouvement djihadiste Boko Haram.
Dernière modification de cette fiche par le service des enseignements (sg12@ehess.fr) : 9 novembre 2018.