Logo EHESS

baobab
Base de données des enseignements et séminaires de l'EHESS

L’orientalisme en train de se faire. Atelier d’archives

  • Marie Bossaert, postdoctorante à l'École française de Rome ( Hors EHESS )
  • Augustin Jomier, titulaire d'une chaire d'excellence (INALCO) ( Hors EHESS )
  • Emmanuel Szurek, maître de conférences de l'EHESS ( CETOBaC )

    Cet enseignant est référent pour cette UE

S'il s'agit de l'enseignement principal d'un enseignant, le nom de celui-ci est indiqué en gras.

3e vendredi du mois de 10 h à 13 h (salle AS1_23, 54 bd Raspail 75006 Paris), du 16 novembre 2018 au 21 juin 2019. La séance du 16 novembre se déroulera de 15 h à 18 h (salle AS1_08, 54 bd Raspail 75006 Paris) ; celle du 21 juin se déroulera, de 10 h à 13 h, en salle AS1_24

Menée conjointement avec un collectif de chercheuses et de chercheurs (Claire Fredj, maîtresse de conférences à l'Université Paris-Ouest Nanterre-La Défense ; Benjamin Guichard, directeur scientifique de la BULAC ; Alain Messaoudi, maître de conférences à l'Université de Nantes ; Magali Nié, archiviste ; Aurélie Pérrier, docteure en histoire ; Naomi Russo, archiviste à l'EHESS ; Blaise Wilfert-Portal, maître de conférences à l'École normale supérieure) cette enquête entamera cette année sa troisième année consécutive. Elle vise à écrire une histoire de l'orientalisme par ses pratiques. Nous saisissons l’orientalisme dans son épaisseur sociale et intellectuelle, intime et politique, locale et transnationale. Pour ce faire, nous travaillons directement à partir de la correspondance inédite (conservée à l'EHESS) de l’arabisant et berbérisant René Basset (1855-1924) qui fut le premier doyen de la faculté des lettres d’Alger. L'objectif de cet atelier est d’étudier la science orientaliste « en train de se faire » – c’est-à-dire sur le terrain, notamment colonial – plutôt qu’à partir de ses seules expressions publiques et publiées. Cette ethnographie de l’archive repose sur une étroite collaboration entre archivistes, conservateurs de bibliothèque et chercheurs en sciences sociales. L'essentiel des séances de cette année sera consacré à la discussion des textes appelés à composer un ouvrage collectif.

Suivi et validation pour le master : Bi/mensuel annuel (24 h = 6 ECTS)

Mentions & spécialités :

Domaine de l'affiche : Histoire - Histoire et civilisations de l'Europe - Monde musulman

Intitulés généraux :

  • Emmanuel Szurek- Histoire linguistique (Turquie-Europe, XIXe-XXe siècles)
  • Adresse(s) électronique(s) de contact : emmanuel.szurek(at)gmail.com

    Compte rendu

    Cet atelier, au sens fort du terme, est le fruit d’une expérience scientifique et pédagogique originale associant des historien·ne·s, des archivistes, un bibliothécaire et des étudiant·e·s de master et de doctorat. Il a pour matière première, et pour objet, un unique fonds d’archives, qui lui donne sa cohérence intellectuelle et historique : la correspondance familiale, amicale, scientifique et administrative de l’orientaliste René Basset. Ces archives – environ 30 000 lettres courant des années 1860 aux années 1920 –, nous sommes allés les chercher chez ses descendants, à Gérardmer, dans les Vosges, en juillet 2014, avant qu’elles ne fassent l’objet d’un don formel à l’EHESS. Nous les avons ensuite reconditionnées, en avons numérisé une partie (accessible en ligne au public du séminaire) et les avons finalement exploitées collectivement. 2018-2019 a marqué un tournant puisque nous avons commencé à composer un ouvrage collectif associant étroitement enseignants (Marie Bossaert, Claire Fredj, Augustin Jomier, Alain Messaoudi, Emmanuel Szurek, Blaise Wilfert-Portal) et étudiants ou anciens étudiants en master ou doctorat (Sarah Asset, Anna Damon, Caroline Emin, Bengisu Zeynep Ertuğrul, Gabriel Malek, Élise Paysant, Juliette Ronsin, Margo Stemmelin), ainsi que Benjamin Guichard (BULAC) et les archivistes Magali Nié et Naomi Russo.

    Ce travail s’inscrit ainsi dans le sillage des relectures critiques d’Edward Said entreprises, entre autres, par Lucette Valensi, François Pouillon et Alain Messaoudi. Celle-ci suppose un retour historique et sociologique aux formes du travail orientaliste et à ses acteurs, y compris « orientaux ». À cet égard, la correspondance Basset offre un observatoire inespéré pour repartir du quotidien de l’orientalisme plutôt que de ses productions et définitions institutionnelles, et cela pour trois raisons.

    Cette archive est celle d’un orientaliste « sur le terrain » : à travers les interactions de Basset avec les fonctionnaires et administrateurs locaux (instituteurs, officiers interprètes, employés du culte musulman), ses élèves et anciens élèves ; ou encore le monde de l’édition, elle donne à voir une science philologique et ethnographique en train de se faire. Elle renseigne sur la collecte, les informateurs, la constitution et la transmission de l’expertise ; elle permet en somme d’envisager l’écriture d’une histoire pratique du métier d’orientaliste.

    Cette archive se distingue en ce qu’elle est centrée sur l’Université d’Alger, cas unique d’université coloniale dans l’Empire français. Une école savante orientaliste émerge sous nos yeux, au croisement des sciences sociales en formation (linguistique, ethnologie, sociologie), et qui a vocation à constituer un pôle alternatif à la centralité parisienne sur la scène académique internationale. Le fonds Basset livre ainsi une vision décentrée de l’intelligence orientaliste.
    Cette archive n’est pas que scientifique ou professionnelle. C’est aussi une correspondance familiale, amicale, mondaine et sentimentale qui restitue les à-côtés du travail orientaliste : le vécu d’une famille, et d’une fratrie – le frère de René est lui-même administrateur colonial en Algérie –, à cheval entre la métropole et l’Algérie et les circulations de biens et de personnes qui en résultent ; la construction d’une notabilité universitaire dans la société coloniale ; la question enfin de la reproduction d’un « capital orientaliste » d’une génération à l’autre. Notre ambition est alors de repenser une expérience de savoir dans son épaisseur biographique, en proposant, en écho à la notion de « vies impériales », une ethnographie des vies orientalistes.

    Publications

    • Avec Nathalie Clayer et Fabio Giomi, Kemalism : Transnational Politics in a Post-Ottoman World, Londres-New York, I.B. Tauris, 2018.
    • « Histoire d’un feu de paille académique. Les avatars du paradigme touranien en français scientifique (années 1850-1870) », dans Le Touran : entre mythes, orientalisme et construction identitaire, sous la dir. de Anna Caiozzo, Laurent Dedryvère, Stéphanie Prévost, Valenciennes, Presses universitaires de Valenciennes, 2019, p. 191-218.
    • « Avant le pantouranisme. Şemsettin Sami et l’introduction du Touran des comparatistes dans l’Empire ottoman (années 1880-1890) », dans Le Touran : entre mythes, orientalisme et construction identitaire, op. cit., p. 218-235.
    • Avec Nathalie Clayer et Fabio Giomi, Kemalism : Transnational Politics in a Post-Ottoman World, op. cit., p. 19-55.
    • « The man sick of Europe. A transnational history of scientific fantasy in 1930s Turkey », dans Kemalism : Transnational Politics in a Post-Ottoman World, op. cit., p. 282-326.

    Dernière modification de cette fiche par le service des enseignements (sg12@ehess.fr) : 23 octobre 2018.

    Contact : service des enseignements ✉ sg12@ehess.fr ☎ 01 49 54 23 17 ou 01 49 54 23 28
    Réalisation : Direction des Systèmes d'Information
    [Accès réservé]