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Mardi (54 bd Raspail 75006 Paris), du 4 décembre 2018 au 4 juin 2019. Cf. calendrier, horaire et salles ci-dessous
Le séminaire poursuit le travail entrepris en 2017-2018
Les pays africains de la zone franc dont le sous-sol est riche en minerais précieux (en or notamment) semblent être pris en tenaille entre d’un côté l'obligation de déposer à la Banque de France la moitié de leurs réserves de change, et de l’autre l’impossibilité dans le contexte actuel de constituer des réserves d’or pour leur propre compte.
Le séminaire entend documenter cet apparent paradoxe qui repose davantage sur des choix politiques que sur des contraintes naturelles.
Les travaux ne manquent pas qui analysent cet aspect des politiques noélibérales consistant à faire de l’or une simple matière première (en 1971 Nixon suspend la parité or-dollar lui enlevant pour la première fois rôle monétaire de l’or initié il y a plusieurs milliers d’années) et à exiger des pays riches en ressources de libéraliser leur code minier afin d’attirer sur leur territoire les industries étrangères du secteur extractif.
Les travaux ne manquent pas non plus qui documentent la nécessité d’un débat sur la zone franc et ses répercussions sur les économies nationales et sous-continentales (Nubukpo et all., 2016). Kako Nubukpo, l’un des auteurs de Sortir l’Afrique de la servitude monétaire, « réclame qu’on ne déconnecte pas le débat monétaire du débat sur l’émergence ». Et on a le sentiment que l’émergence économique des pays africains n’est guère envisageable dans ce contexte de prédation des richesses minières et foncières (Leclerc-Olive, 2017).
L’objectif de ce séminaire est donc de rapprocher ces deux corpus de recherche pour penser les liens entre ces deux phénomènes. Il s'agit d’analyser les pratiques, de clarifier les enjeux et, surtout, de resituer ces politiques dans le contexte d'interdépendance étroite entre les économies du Nord et du Sud (Mbembe, 2013, 2016).
8 janvier 2019 : Gouvernance de l’extraction, gouvernance de la prédation ?
Mots-clés : Développement, Économie politique, État et politiques publiques, Finance, Globalisation,
Aires culturelles : Afrique,
Intitulés généraux :
Renseignements :
Michèle Leclerc-Olive par courriel.
Direction de travaux d'étudiants :
Michèle Leclerc-Olive sur rendez-vous.
Réception :
Michèle Leclerc-Olive sur rendez-vous.
Niveau requis :
master 1.
Adresse(s) électronique(s) de contact : mleclerc(at)ehess.fr
Les séances du séminaire ont poursuivi le travail entrepris l’année précédente, avec pour objectif de préparer la journée d’étude de juin 2019.
La première séance fut consacrée à l’examen des contestations et des alternatives théoriques et populaires que l’on observe dans les pays de la zone franc. Animée par H. Gombert, M. Diouf et K. Nubukpo, elle a mis surtout l’accent sur les analyses et les propositions des partis politiques qui semblent avoir du mal à relayer les prises de position parfois mal documentées des jeunes et des mouvements sociaux.
La deuxième séance, intitulée Gouvernance de l’extraction, gouvernance de la prédation ?, a donné la parole à L. Duarte coordinateur de la campagne Tournons la page, pour présenter le rapport de cette campagne publié en 2017, sous le titre « En Afrique comme ailleurs, pas de démocratie sans justice fiscale ». M. Leclerc-Olive a introduit la séance en présentant une analyse des rapports de l’ITIE et de PCQVP au Mali : si l’on ne peut que partager la position exprimée dans le titre du rapport, il reste que l’on peut également s’interroger sur la transparence limitée à laquelle ces rapports donnent accès : centrés sur le segment financier qui va des multinationales minières à l’État, ils restent silencieux sur l’usage de ces redevances, sur le chiffre d’affaires des entreprises, sur la rétribution des actionnaires, sur les prix de transfert, etc.
La séance suivante, introduite par B. Théret, fut consacrée à l’extractivisme numérique. Animée par C. Vercellone et Odile Lakomski Laguerre, cette séance a permis de découvrir non seulement l’usage (métaphorique ?) du langage propre à l’exploitation des ressources naturelles par les promoteurs de crypto-monnaies (extraction, or numérique, etc.), mais aussi le fonctionnement du capitalisme de plateformes. Assiste-t-on à la promotion d’une finance « hors sol » alternative aux ressources naturelles non renouvelables, alors que se multiplient les mouvements et les prises de position en faveur d’un retour raisonné à une économie ancrée dans les territoires ? Cette question sera réexaminée dans le cadre du séminaire de l’an prochain.
La séance d’avril animée par Boris Samuel et Olivier Vallée, a examiné l’économie politique de l’endettement souverain (du Congo Brazzaville) et les stratégies (licites et illicites) mises en œuvre pour utiliser les ressources naturelles du pays (ici, le pétrole) afin de garantir l’accès à des financements extérieurs.
En mai, K. Nubukpo et M. Leclerc-Olive sont revenus sur les premières années d’indépendance des pays d’Afrique de l’Ouest. La période 1958-1963 fut en effet décisive pour le devenir de la zone franc. La vision monétaire de Sylvanus Olympio au Togo – il fut assassiné avant d’avoir pu concrétiser son projet – et l’éclatement de l’éphémère Fédération du Mali (août 1960) sont autant d’éléments qui plaident en faveur d’un réexamen approfondi de cette période où l’Afrique de l’Ouest (au moins certains pays de cette région du monde) aurait pu construire une alternative économique à la poursuite (ou la reprise sous une autre forme) de la sujétion coloniale à l’égard des grands acteurs économiques du premier et du deuxième monde.
Le cycle de séminaires a été clôturé par une journée d‘étude accueillie par la Fondation Jean Jaurès : Réserves minières et réserves monétaires. Ordres et désordres. Elle fut scindée en deux panels. Le premier, consacré à la gestion des réserves et à la défense de la « stabilité », avait pour mission de donner à voir comment le dispositif du franc CFA et la gestion de ces ressources naturelles interagissent. Il a interrogé les capacités réelles des États à récupérer les bénéfices de l’extraction de ces ressources non renouvelables – notamment, en revenant sur les dispositifs ITIE et les codes miniers, il s’agissait d’examiner quels en sont, au final, les bénéficiaires.
Le second fut consacré aux recompositions et aux contestations dans le champ de l’extraction, et plus spécialement aux paris que constituent les projets de rupture avec les pratiques actuelles.
La conclusion de la journée, en dialogue avec C. Le Moing de la Fondation Gabriel Péri, a tracé les grandes lignes du programme de recherche de l’année prochaine.
Dernière modification de cette fiche par le service des enseignements (sg12@ehess.fr) : 20 décembre 2018.