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Vendredi de 9 h 30 à 12 h 30 (54 bd Raspail 75006 Paris), du 5 octobre 2018 au 7 juin 2019. Cf. calendrier des séances et salles ci-dessous
Cette année, le séminaire reprendra la thématique de la comparaison des rituels des sociétés bouddhiques en l'approfondissant, à partir d'ethnographies originales ou déjà publiées. la comparaison s'articulera autour de deux pôles, le bouddhisme Theravâda (et en particulier birman) et le bouddhisme Mahâyâna (et en particulier tibétain). S'intéresser dans une perspective d'anthropologie comparative aux rituels du monde bouddhique pose des questions de typologie, d'analyse de configurations rituelles et de place dans un champ rituel, ou encore des caractéristiques propres à des traditions régionales/nationales ou plus partagées des traditions bouddhiques: principes d'efficacité, formes d'ancrage socio-religieux, formes rituelles privilégiées, etc. Plus largement, il s'agira à chaque fois, de relancer les débats existants en matière de théorie du rituel. Une dimension clé de l'analyse sera l'engagement systématique dans la démarche comparative: les différentes séances, consacrées principalement à l'étude des catégories majeures de rituels collectifs bouddhiques, contrasteront de façon systématique les pratiques, les catégories emic et etic et les interprétations reçues dans les domaines du Theravâda et du Mahâyâna.
Séances :
5 octobre 2018 (salle A06_51) : Le rituel : théories anthropologiques, notions bouddhiques et asiatiques du rituel
23 novembre 2018 (salle A06_51) : Espace et temps du rituel: lieux du religieux, calendriers
7 décembre 2018 (salle A06_51) : Donation et éthique du laïc bouddhiste en contexte de rituel collectif
11 janvier 2019 (salle A06_51) : Rituels d'institution du monachisme bouddhique
1er février 2019 (salle A05_51) : Autres rituels communautaires : rassemblements de pratiquants, rituels centrés sur les maîtres
15 mars 2019 (salle A05_51) : Rituels du cycle de vie
12 avril 2019 (salle A07_37) : Rituels collectifs de gestion de la mort
10 mai 2019 (salle A07_37) : Séance de présentation des travaux des étudiants
7 juin 2019 (salle A07_51) : Rituels d'État/de renouvellement de l'ordre cosmique
Mots-clés : Anthropologie, Comparatisme, Ethnographie, Religieux (sciences sociales du), Rituel,
Aires culturelles : Asie,
Suivi et validation pour le master : Mensuel annuel/bimensuel semestriel (8x3 h = 24 h = 6 ECTS)
Intitulés généraux :
Centre : CASE - Centre Asie du Sud-Est
Direction de travaux d'étudiants :
sur rendez-vous. Dossier de 12-15 pages analysant un rituel bouddhique (observation personnelles ou à partir de la bibliographie) et se servant de manière critique des données développées dans le cours.
Réception :
Nicolas Sihlé, Centre d'études himalayennes ; Bénédicte Brac de la Perrière, Centre Asie du Sud-Est.
Niveau requis :
Ouvert aux étudiants L3, Master et doctorants avec un intérêt marqué pour les cultures asiatiques et le bouddhisme.
Adresse(s) électronique(s) de contact : nicolas.sihle(at)gmail.com, brac(at)cnrs.fr
Le séminaire d’Anthropologie comparée du bouddhisme a pour but de développer l’étude anthropologique du bouddhisme dans la vague des anthropologies axées sur les grandes religions. Il offre un espace pour une approche comparative au-delà du relatif cloisonnement selon les différentes formes du bouddhisme (Theravāda, Mahāyāna non tantrique ou tantrique) ou selon ses différentes traditions nationales ou ethniques.
Pendant l’année 2018-2019, le séminaire a repris la thématique de la comparaison des rituels des sociétés bouddhiques, en l’approfondissant, à partir d’ethnographies originales ou déjà publiées. La comparaison s’est articulée autour de deux pôles, le bouddhisme Theravāda (et en particulier birman) d’un côté, le bouddhisme Mahāyāna (et en particulier tibétain et newar) de l’autre, à chaque séance, selon le principe d’un séminaire à deux voix. Dans notre perspective d’anthropologie comparative des rituels du monde bouddhique, nous avons contrasté de façon systématique, pour chaque sous-thème, les pratiques, les catégories emic et etic et les interprétations reçues, sur les deux terrains. Nous nous sommes posé des questions de typologie, d’analyse de configuration rituelle et de place dans un champ rituel, mais aussi de caractéristiques des ritualités bouddhiques en termes de principes d’efficacité, de formes rituelles, de formes d’ancrage socio-religieux, etc.
Le programme des séances a porté sur l’étude de catégories majeures de rituels collectifs bouddhiques telles qu’on peut les construire à partir de nos terrains et domaines d’expertise respectifs.
Dans la première séance, le 5 octobre 2018, nous avons posé les principales définitions anthropologiques de la religion et du rituel et attiré l’attention sur la place du bouddhisme dans l’histoire de ces définitions et de leur évolution. Nous avons ensuite présenté les principales approches anthropologiques existantes du champ rituel dans les sociétés bouddhiques et les typologies du rituel qui en ont été tirées. Enfin nous avons analysé comparativement la place du champ rituel et la terminologie vernaculaire des rituels sur chacun de nos terrains.
La séance suivante, le 23 novembre 2018, a été consacrée aux notions de l’espace et du temps dans l’analyse du rituel, aux lieux du religieux et aux calendriers, qui constituent les premiers cadres formels des rituels. La comparaison des terminologies dans le domaine du Theravāda et du Mahāyāna fait apparaître des variations de configuration spatiale du religieux qui déterminent la différenciation entre laïcs et religieux, selon le caractère permanent ou temporaire, habité ou non, et les niveaux d’articulation sociale de ces lieux. Les variations dans la combinaison de différents cycles rituels ne sont pas moins significatives, faisant apparaître dans chaque calendrier des temps de focalisation différents.
Le 7 décembre 2018, la séance a porté sur « Donation et éthique du laïc bouddhiste en contexte de rituel collectif ». L’examen des rituels collectifs de donation bouddhique en Birmanie et en Asie du Sud-Est, en général, et chez les Newar et les Tibétains, a été l’occasion de discuter de l’obligation ou non-obligation de réciprocité à partir d’un travail sur le vocabulaire analytique des transactions. Selon des caractéristiques religieuses (diversité des panoplies rituelles selon les formes de bouddhisme) mais aussi sociétales, telles que la forme du sangha (le clergé bouddhique), monastique dans le cas du Theravāda, ou plus complexe dans celui des sociétés tibétaines, les formes de transactions varient, faisant une place plus ou moins centrale à la donation méritoire (du type aumônes) avec un degré variable d’euphémisation de la rémunération pour services religieux. La place de l’idéologie du mérite dans la sotériologie bouddhique a pu être discutée dans son lien avec les caractéristiques du don bouddhique, non réciproque et asymétrique.
Le 11 janvier 2019, nous avons traité des « Rituels d’institution du monachisme bouddhique ». L’« ordination » ou entrée dans l’ordre bouddhique (sangha) constitue le principal des rituels d’institution de ces sociétés parce qu’il instaure une différence radicale de statut qui fonde les relations entre moines et laïcs. Composée de deux étapes/formes, l’entrée en religion (pabbajjā) et la consécration plénière (upasampadā), l’« ordination » est peut-être le plus étudié des rituels bouddhiques et son histoire constitue le noyau dur de l’histoire institutionnelle du bouddhisme. La traduction par « ordination » a été contestée par Louis Gabaude, du fait de la généalogie chrétienne du terme. Il recommande d’utiliser plutôt le terme de « consécration ». Quoi qu’il en soit, constituer ces procédures en une classe de rituels d’institution permet de comparer l’émergence de corps de spécialistes religieux dans différents contextes. Dans le bouddhisme, selon les cas, ce rituel peut être strictement monastique ou servir de rite de passage dans la société, dans un lignage ou dans une caste, et il dépend donc étroitement des formes sociales dans lesquelles les sangha particuliers s’inscrivent.
La séance du 1er février 2019 a été consacrée aux autres rituels communautaires, notamment aux rassemblements de pratiquants spécialistes et aux rituels centrés sur les maîtres, sur chacun de nos terrains respectifs, c’est-à-dire, des rituels (re)producteurs de collectivité en milieu de spécialistes non monastiques. La notion de pratiquants, véritables spécialistes religieux, a été introduite, pour complexifier le dualisme classique moine/laïc. Nous avons ainsi examiné les « festins tantriques » (skt. ganacakra) ou rituels de la « multitude » (tib. tsok) dans la tradition tantrique indo-tibétaine, qui reposent sur la commensalité, ou, en Birmanie, dans le domaine hétérogène de pratique virtuose des weikza, des réunions qui peuvent être informelles ou au contraire constitutives dans le cas d’une congrégation d’exorcistes. Enfin, l’exemple de l’hommage du maître (wai khru) en Thaïlande, a été présenté en tant que fondateur de domaines de pratiques de la performance : en tant qu’il place au centre la transmission de la connaissance, il constitue la matrice de tout rituel.
Le 15 mars 2019, nous sommes passés aux rites du cycle de la vie en proposant une vue synoptique de la part bouddhique de ces rites de passage dans les aires considérées. Les rituels les plus importants du point de vue bouddhique sont ceux de l’initiation bouddhique, ou entrée en religion temporaire, et les rituels funéraires. Nous avons considéré la part de l’héritage brahmanique ou hindou dans les autres occasions rituelles, héritage passé par la royauté dans l’Asie du Sud-Est « indianisée » et encore plus marqué dans la société de caste newar, qui présente de ce point de vue là un fort contraste avec l’exemple tibétain. Ces rituels soulèvent des questions sur les dynamiques internes à ces champs religieux plus ou moins bouddhisés, marqués par des « survivances » locales et, pour certains, par une influence brahmanique.
Le 12 avril 2019, il a été question de « la gestion de la mort dans ses dimensions collectives ». Parmi les rituels du cycle de la vie, ceux liés à la mort sont les seuls qui imposent la présence des moines du fait de son importance dans la théorie de la transmigration. Pour autant, il n’y a pas de modèle prescriptif bouddhique de funérailles. On reconnaît cependant un modèle commun, au moins dans le Theravāda, qui combine le traitement des composantes immatérielles de la personne avec le transfert de mérites de nature à assurer la transformation du mort (le passage de la transmigration). La part collective de ces rituels repose sur la nécessité de protéger la société de la mort et de reconstituer le tissu social. Elle implique la présence des moines qui agissent essentiellement par le pouvoir des textes qu’ils récitent. Différentes catégories de mort existent, laissant ou pas des restes (malemort/sainteté). Dans les mondes thaï et khmer, des rituels réguliers de gestion des morts non réincarnés sont accomplis, révélant une continuité entre une partie du monde theravadin et les mondes chinois et japonais – mais si ces rituels collectifs ont traditionnellement une importance (religieuse, sociale, économique) majeure en Chine par exemple, ils n’ont guère d’équivalent au Tibet. Charlotte Lamotte a participé à cette séance en nous parlant de la fête bouddhique des morts et des cérémonies pour les morts à la guerre au Japon.
La séance du 10 mai 2019 a été consacrée aux présentations des étudiants.
La dernière séance, le 7 juin 2019, a porté sur les rituels d’État et de renouvellement socio-cosmique. Elle a été l’occasion de présenter l’ethnographie d’une série de « grands rituels » : la fête annuelle du Phra Bang au Laos, celle de l’Asala Perahara au Sri Lanka, le festival de Taunbyon en Birmanie, le Mönlam Chenmo à Lhassa, le Yartung de la vallée de Muktinath (bordure tibétaine du Népal) et la fête de Machendranath à Kathmandou. Ces grandes fêtes qui sont des complexes rituels mobilisant la société locale pendant plusieurs jours, ont été présentées du point de vue du temps du rituel, des lieux et des déplacements dans l’espace, des officiants concernés, de la place du divin et de celle du souverain ou, aujourd’hui, des autorités politiques.
Dernière modification de cette fiche par le service des enseignements (sg12@ehess.fr) : 29 janvier 2019.