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Base de données des enseignements et séminaires de l'EHESS

Revisiter la Révolution iranienne de 1979

  • Marie Ladier-Fouladi, directrice de recherche au CNRS (TH) ( IIAC )

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1er, 3e et 5e jeudis du mois de 11 h à 13 h (salle 4, 105 bd Raspail 75006 Paris), du 17 janvier 2019 au 20 juin 2019. La séance du 20 juin aura exceptionnellement lieu de 9 h à 13 h (même salle). La séance du 31 janvier se déroulera au BAL (6, Impasse de la Défense, 75018 Paris, inscription obligatoire)

Le 11 février 2019, l’Iran commémorera le 40e anniversaire de la révolution. Une révolution très tôt stigmatisée comme islamique tant Khomeiny et le clergé chiite semblaient avoir contrôlé l’ensemble d'un processus qui a abouti à l’instauration de la République islamique et à l’institutionnalisation des règles de la charia. L’enjeu consiste donc à démontrer que contrairement aux idées et discours prédominants, la Révolution iranienne n’était dans sa genèse ni islamique, ni religieuse et encore moins khomeiniste. Cette révolution, comme toutes les révolutions, fut l’œuvre d’un ensemble complexe, composé d’acteurs et d’idées antagoniques. Elle a découlé d’un processus lent qui a gagné en épaisseur au fur et à mesure que les vagues de protestation montaient et regroupaient des fractions toujours plus importantes du corps social. Seulement, le clergé chiite, sous l’égide de Khomeiny, a su mieux capter l’élan du mouvement protestataire que les groupes sociaux et les formations politiques concurrents, qu’ils soient laïcs musulmans, démocrates ou d’extrême gauche, communistes ou non communistes dans un vaste éventail de maoïstes, trotskistes, staliniens, libertaires.

Il s’agit pour nous de revenir sur les années révolutionnaires en nous intéressant aux symptômes culturels et sociétaux d’une insistance politique. L’aspiration à la liberté face à la tyrannie et au risque de guerre civile qui ont présidé à la Révolution iranienne de 1979 demeure malgré sa confiscation par Khomeiny. C’est dans les institutions civiles, leurs traductions démographiques, la vie intellectuelle et politique que nous puiserons les traces et les arguments de cette insistance. Cette insistance témoigne d’un certain courage, conscient ou inconscient, qui pourrait s’épuiser et signerait par épuisement seulement maintenant, la victoire annoncée de longue date d’une oppression orchestrée par un Guide suprême sous couvert d’un président supposé modéré.

31 janvier (BAL 6, Impasse de la Défense, 75018 Paris) : séance dans le cadre de l’exposition « Rue Enghelab, la révolution par les livres. Iran 1979-1983 » (inscription obligatoire)

  • Chowra Makaremi (CNRS - EHESS /IRIS) présentera le catalogue de l’exposition : « Rue Enghelab, la révolution par les livres. Iran 1979-1983 »
  • Marie Ladier-Fouladi (CNRS- EHESS/IIAC) présentera une communication intitulée : « La jeunesse iranienne : principale protagoniste de la Révolution de 1979

La population iranienne est restée pendant longtemps particulièrement très jeune. Cependant, cette jeunesse « biologique » n’a pas trouvé de représentation sociale avant la fin des années 1960. L’émergence de la catégorie « jeune »,  exprimait la nouvelle forme d’individuation qui s’étendait à de larges couches sociales en milieu urbain iranien. Les jeunes, conscients de leurs caractéristiques communes, ont commencé à se penser comme un groupe à part et ont tenté alors d’affirmer, peu à peu, leurs différences par rapports aux générations anciennes. Ils se sont surtout opposés à l'ordre patriarcal de la famille fondé sur l'hégémonie hiérarchique de l'âge et du sexe. En même temps, ils ont cherché à se forger une identité sociale et à inventer les cadres sociaux qu’ils leurs soient propres (les bandes, les rassemblements, les clubs et associations). Mais le verrouillage politique de l'espace social ne laissait aucune issue à la jeunesse pour gagner autonomie et épanouissement, et les contraignit à vivre sous l’emprise de leur famille.  Un sentiment de frustration, de colère, voire de révolte, se développa dans la jeunesse iranienne, principalement issue des couches moyennes urbaines, qui s’est progressivement transformé en une opposition au système et une revendication de liberté politique. Dans les grandes villes, les manifestations éparses contre le régime, auxquelles se joignaient d’autres catégories sociales, ont, par un effet de cristallisation, conduit aux journées révolutionnaires et au renversement de la monarchie en février 1979.

7 février 2019 : Marie Ladier-Fouladi, «  Poétique d’une révolution à venir »

21 février 2019 : Marie Ladier-Fouladi, « Sensible, politique, image : Le cinéma iranien des années 1960-1970 »

7 mars 2019 : Saeed Paivandi (professeur des universités en sciences de l’éducation Université de Lorraine), « L'islamisation du système éducatif : quatre décennies d'expériences »

21 mars 2019 : Chowra Makaremi (CNRS - EHESS/IRIS),  « Enquêter sur la révolution iranienne par delà les lignes rouges »

4 avril 2019 : Mohsen Motaghi (docteur en sociologie, spécialiste des penseurs musulmans chiites iraniens ), « Les deux lectures politiques de l’islam chiite duodécimain et la Révolution iranienne de 1979 »

18 avril 2019 : Mehrdad Vahabi (économiste, professeur des universités, Université Paris 13), « La réforme agraire, le changement institutionnel et le développement du capitalisme en Iran dans les années 1960 ».

16 mai 2019 : Julie Duvigneau (maîtresses de conférences en langue et littérature persanes à l’INaLCO), « Les écrivains iraniens à l’aube de la Révolution de 1979 : témoins ou acteurs de la contestation ? »

6 juin 2019 : Marie Ladier-Fouladi, « La conquête du pouvoir par Khomeiny »

20 juin 2019 (de 9 h à 13 h) : Présentation de travaux d’étudiants ; conclusion du séminaire

Aires culturelles : Iranien (monde),

Suivi et validation pour le master : Bi/mensuel annuel (24 h = 6 ECTS)

Mentions & spécialités :

Domaine de l'affiche : Sociologie

Intitulés généraux :

Renseignements :

pour tous renseignements contacter l'enseignante par courriel.

Direction de travaux d'étudiants :

sur rendez-vous, demandé par courriel.

Réception :

sur rendez-vous, demandé par courriel.

Niveau requis :

tous niveaux.

Site web : http://www.iiac.cnrs.fr/article1921.html

Adresse(s) électronique(s) de contact : ladier(at)ehess.fr

Compte rendu

La Révolution iranienne de 1979 a très tôt été stigmatisée comme islamique tant Khomeiny et le clergé chiite semblaient avoir contrôlé l’ensemble d’un processus qui a abouti à l’instauration de la République islamique et à l’institutionnalisation des règles de la charia. L’enjeu consiste donc à démontrer que, contrairement aux idées et discours prédominants, la Révolution iranienne n’était, dans sa genèse, ni islamique, ni religieuse et encore moins khomeiniste. Cette révolution, comme toutes les révolutions, fut l’œuvre d’un ensemble complexe, composé d’acteurs et d’idées antagoniques. Elle a découlé d’un processus lent qui a gagné en épaisseur au fur et à mesure que les vagues de protestation montaient et regroupaient des fractions toujours plus importantes du corps social. Seulement, le clergé chiite, sous l’égide de Khomeiny, a su mieux capter l’élan du mouvement protestataire que les groupes sociaux et les formations politiques concurrents, qu’ils soient laïcs musulmans, démocrates ou d’extrême gauche, communistes ou non communistes dans un vaste éventail de maoïstes, trotskistes, staliniens et libertaires.

Il s’agissait donc de revenir sur les années révolutionnaires en examinant les symptômes culturels et sociétaux d’une instance politique. Après avoir présenté les principaux protagonistes de cette révolution, à savoir les jeunes citadins, Marie Ladier-Fouladi s’est intéressée à la poésie et au cinéma qui, en l’absence des partis et organisations politiques, ont joué un rôle indéniable dans la sensibilisation de cette jeunesse urbaine aux questions sociales et politiques et, par voie de conséquence, dans sa politisation.

Sur cette toile de fond, Julie Duvigneau, tout en présentant la littérature moderne persane qui entretient des liens très forts avec l’idée de démocratie, a cherché à faire apparaître les courants de pensée qui sous-tendaient la création littéraire iranienne de la période 1950-1978. Mohsen Motaghi a analysé les pensées d’Ali Shariati et de Morteza Mothahari (fils spirituel de Khomeiny), figures emblématiques des deux lectures politiques du chiisme duodécimain. Mehrdad Vahabi a examiné la réforme agraire de 1963 et ses conséquences sur les institutions étatiques et civiles. Chowra Makerami, s’interrogeant sur le processus de construction étatique et nationale dans les années qui suivirent le renversement de la monarchie, a proposé une réflexion sur la méthodologie à employer pour s’émanciper des lignes rouges tracées par le pouvoir étatique qui frappent d’interdit certaines investigations. Enfin, Marie Ladier-Fouladi a conclu le séminaire en analysant les principaux facteurs qui ont contribué à la prise du pouvoir par Khomeiny.

Dernière modification de cette fiche par le service des enseignements (sg12@ehess.fr) : 12 février 2019.

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