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Base de données des enseignements et séminaires de l'EHESS

Espace(s) monétaire(s) monnaies parallèles, crypto-monnaies et crises institutionnelles

  • Maël Rolland, doctorant à l'EHESS ( CEMI )
  • Jacques Sapir, directeur d'études de l'EHESS (*) (TH) ( CEMI )

    Cet enseignant est référent pour cette UE

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1er et 3e lundis du mois de 17 h à 19 h (salle 3, 105 bd Raspail 75006 Paris), du 15 octobre 2018 au 1er avril 2019. La séance du 18 mars est reportée au 25 mars (salle 4, même adresse)

En 2009, une innovation monétaire d’ampleur a vu le jour sous les traits du Bitcoin, qui, des dires même de « son créateur », répondait à la crise financière de 2007. Cette contestation monétaire prétendait offrir, via un réseau pair-à-pair et des protocoles cryptographiques, un système monétaire et de paiement décentralisé s’abstrayant le plus possible des sceaux et signatures de tiers crédibles. Dans son sillage et suivant ses caractéristiques open source, une grande diversité de crypto-monnaies (altcoins), reposant sur des protocoles de registre distribué (DLT ou « Blockchain ») plus ou moins spécifiques, ont émergé. Depuis une trentaine d’années et dans un mouvement analogue, les monnaies locales, sociales et complémentaires (MLC) connaissent un dynamisme important.

L’existence d’une multitude de monnaies parallèles interroge la nature de la monnaie et ne peut en laisser indemne les représentations dominantes. Ces monnaies soulignent que la structuration de l’espace monétaire est le fait d’une diversité d'instruments, de dispositifs institutionnels et techniques, d’agents et de représentations. Dans leurs usages – instituant des cloisonnements, ou décloisonnements, entre les personnes, les biens, les services et les territoires – l’argent et son pendant pratique qu’est la monnaie sont des institutions : des structures matérielles et des parties prenantes définies, régies, et gouvernées par un ensemble de règles. L’hétérogénéité que les monnaies parallèles impliquent et qu’elles revendiquent, contraste avec les caractéristiques d’unicité et d’exclusivité monétaire aujourd'hui axiomatisées tant en théorie qu’en pratique. Le développement de monnaies parallèles lors de crises économiques, sociales et politiques, en réaction à celles-ci et y prenant part, révèlent ainsi crûment les enjeux et conflits qui traversent toujours un espace monétaire et sa communauté de paiement. Ces monnaies sont l’expression pratique d’une tension en valeur, en confiance et en souveraineté qu’implique la coexistence de systèmes de paiement et de règlement différents, mettant aux prises des agents, des groupes et des sphères axiologiques disparates. 

Ce séminaire cherchera à comprendre comment les économies monétaires contemporaines articulent la multiplicité et la diversité des instruments monétaires, des systèmes de paiement et des groupes monétaires à un espace de règlement unifié formant une communauté de paiement homogène. Les innovations monétaires et financières, par les frictions qu’elles engendrent, se font variables d'évolutions clefs de nos sociétés : les sphères institutionnelles hétérogènes constituant l'espace monétaire peuvent ébranler sa stabilité comme son unicité, impliquant de facto des interventions discrétionnaires des autorités compétentes. Ces adaptations institutionnelles et politiques dénotent une tension ontologique traversant l'espace monétaire : le rapport dialectique des logiques individuelles à leur pendant collectif.

Ce séminaire articulera aussi bien des éléments empiriques et historiques – construction historique des monnaies nationales, cas de certaines monnaies parallèles, la question des crypto-monnaies à travers le Bitcoin, dont on soulignera la radicale exemplarité – que des éléments théoriques. Dans la continuité des séminaires dispensés les années précédentes, nous poursuivrons les réflexions amorcées concernant la pluralité et l’hétérogénéité monétaire. Tout en repartant de la théorie monétaire institutionnaliste et en conservant une partie consacrée aux MLC, nous donnerons une place importante aux crypto-monnaies et aux protocoles de registre distribué communément regroupées sous l’appellation « Blockchain ». Comme les MLC, ces systèmes et les communautés qui les portent, mettent la monnaie au centre de leurs analyses. La monnaie y est pensée dans ce qu’elle a de plus ambivalent : vecteur d’oppression, de contrôle et de domination, elle est conçue comme le plus pur outil de l’émancipation. Ces crypto-actifs et leurs arrangements institutionnels renouvelés, deviennent une voie de dé-fétichisation de la monnaie. Questionnant la monnaie dans sa dimension primordiale de système de paiement, elles font ressortir que chaque règle et paramètre constitutifs, relevant de cosmos de valeur spécifique, peut et se doit d’être discuté collectivement.

Les monnaies parallèles, comme les nouveaux monnayeurs qui les font exister, seront traitées de manière transversale comme un champ de recherche privilégié autant que comme des outils heuristiques et herméneutiques. Par son objet et ses problématiques, ce séminaire se veut ouvert à l'ensemble des étudiant-e-s et chercheur-e-s en sciences sociales et issu-e-s d’autres disciplines (mathématiques, informatique, etc.).

Suivi et validation pour le master : Hebdomadaire semestriel (24 h = 6 ECTS)

Mentions & spécialités :

Domaine de l'affiche : Économie

Intitulés généraux :

  • Jacques Sapir- Économie des systèmes économiques ex-soviétiques en transition
  • Direction de travaux d'étudiants :

    pas de permanence mais adresse courriel disponible.

    Réception :

    pas de permanence mais adresse courriel disponible.

    Niveau requis :

    connaissances de base en économie (L3) et/ou connaissances en histoire économique (L3).

    Adresse(s) électronique(s) de contact : rolland.mael(at)hotmail.fr

    Dernière modification de cette fiche par le service des enseignements (sg12@ehess.fr) : 11 février 2019.

    Contact : service des enseignements ✉ sg12@ehess.fr ☎ 01 49 54 23 17 ou 01 49 54 23 28
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