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Mardi de 19 h à 21 h (salle 4, 105 bd Raspail 75006 Paris), les 13 novembre, 11 décembre 2018, 8, 15, 22 et 29 janvier, 5 février, 4, 11, 18 et 25 juin 2019
Alors que les sciences sociales se rapprochent de différentes manières et à différents degrés d’une démarche scientifique, les disciplines juridiques sont restées externes et probablement réfractaires à ce mouvement.
L’objet de ce séminaire est la reconstruction de l’évolution et du maintien d’une discipline faible. Si la capacité explicative et les méthodes relèvent plutôt des arts oratoires que d’un raisonnement ordonné, la prétention de fournir des connaissances pertinentes, inattendues et même déterminantes est constitutive d’un paradoxe fondateur.
Le séminaire est consacré au problème de la valeur explicative des théories du droit et des analyses doctrinales portant sur des questions juridiques particulières dans le domaine du droit constitutionnel comparé – c’est-à-dire des données structurant les systèmes juridiques dans leur ensemble.
Tant les théories de la connaissance juridique que les doctrines juridiques proprement dites (les théories à l’aide desquelles les juristes cherchent à expliquer leurs objets) présentent un degré très élevé de diversité dans le temps comme à l’intérieur du champ disciplinaire contemporain. En dépit d’une technicité très évoluée et souvent hermétique, la prétention à l’objectivité du savoir qu’elles affirment pouvoir offrir paraît faible sinon arbitraire. Il s’en dégage souvent l’impression qu’elles disent plus sur les appréciations subjectives de leur auteur que sur l’objet dont elles traitent.
Le séminaire vise à reconstruire les données fondatrices de ces théories dans une perspective systématique et historique. Il apparaît en effet que certaines thèses récurrentes dans le débat contemporain (la question des « lacunes », le pouvoir « créateur » des juges, la nécessité de « surmonter le formalisme », de trancher des « cas difficiles », de « faire avancer les choses » etc.) plongent leurs racines dans des conceptions anciennes, régulièrement réadaptées et exerçant toujours un grand pouvoir d’attraction. Les théories contemporaines se situent quant à elles dans le sillage de théories philosophiques souvent insuffisamment contextualisées.
La présentation de ces théories dans leur environnement philosophique sera illustrée par des exemples concrets de traitement de questions doctrinales, principalement à travers la présentation de cas jurisprudentiels décidés sous des cadres constitutionnels différents. Cet exercice permettra de faire apparaître tant les origines des concepts et des méthodes utilisés que les effets des solutions proposées dans les différents ordres juridiques en question. La faiblesse de la discipline lui permet paradoxalement de modeler son objet.
Une attention particulière sera consacrée à trois domaines exemplaires. Le constitutionnalisme accompagne la restructuration des ordres juridiques à partir et autour de la formalisation de la constitution et de l’introduction d’un contrôle de constitutionnalité, de droits fondamentaux et de principes d’ajustement comme celui de proportionnalité ou de confiance légitime. L’intégration européenne concurrence ce développement qu’elle cherche à intégrer indirectement faute de disposer des structures centralisantes d’un État. La doctrine européiste a déployé des trésors d’imagination en vue d’accommoder simultanément ces deux exigences : un dispositif institutionnel relativement faible avec un organe juridictionnel très puissant et promouvant les valeurs du constitutionnalisme à travers l’affirmation de principes. La globalisation juridique enfin constitue un mouvement doctrinal cherchant à montrer et en même temps à encourager de nouvelles structures juridiques ou du moins le déclin d’un prétendu étatisme. La confrontation de ces conceptions permettra de voir le travail idéologique à l’œuvre et de mesurer l’écart entre les constructions d’un droit désiré ou rejeté et les données objectives toujours difficiles à interpréter avec exactitude.
Mots-clés : Droit, normes et société, Épistémologie, Globalisation, Histoire du droit, Institutions, Philosophie analytique, Politique, Sémantique, Textes,
Aires culturelles : Amérique du Nord, Amérique du Sud, Europe, Japon,
Suivi et validation pour le master : Bi/mensuel annuel (24 h = 6 ECTS)
Domaine de l'affiche : Droit et société
Intitulés généraux :
Renseignements :
le séminaire accueillera des professeurs invités : Vincezo Zeno Zencovich de l'Université de Roma Tre (janvier-février) et Brian Leiter de l'Université de Chicago (mai-juin 2019).
Direction de travaux d'étudiants :
les étudiants seront évalués à partir de mini-mémoires dont le sujet est à définir avec l'enseignant.
Réception :
avant ou après les séminaires et sur rendez-vous.
Niveau requis :
connaissances en droit et/ou en philosophie souhaitées, mais non obligatoires.
Adresse(s) électronique(s) de contact : otto.pfersmann(at)ehess.fr
Dernière modification de cette fiche par le service des enseignements (sg12@ehess.fr) : 16 novembre 2018.