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2e et 4e jeudis du mois de 10 h à 12 h (Maison de l'Asie, 22 av du Président-Wilson 75116 Paris), du 8 novembre 2018 au 23 mai 2019
Croisant le champ de la géographie avec celui des aires culturelles, ce séminaire prend la mesure de la nature fondamentalement plurielle de l’aire culturelle Corée, qui compte au total environ 80 millions de personnes, et que je qualifie de « méta-nation » : cohérente dans la longue durée, elle est aujourd’hui fragmentée en deux états (la Corée du Sud et la Corée du Nord), et une diaspora. Il entend surtout rompre avec le paradigme actuel des études coréennes en France et à l’étranger, qui produit une « schizo-coréanologie » focalisée sur l’étude de la Corée du Sud et peu consciente du fait que la plupart des faits sociaux et des perspectives pour les analyser sont en réalité formés, et informés, par le système de la division, donc polarisés soit au Nord soit au Sud. Il est donc impossible de se situer vaguement « en Corée » pour mettre en œuvre une recherche critique sur « la Corée » (terme qui, en coréen, est intraduisible sans situer explicitement et politiquement le discours au Nord ou au Sud).
Interrogeant l'espace comme construit social par des méthodes ethnographiques (une « micro-géograohie de terrain »), ce séminaire de géographie culturelle assume donc le caractère fondamentalement politisé de toute recherche critique sur la Corée et se définitn autant par des sujets à différentes échelles (la ville, les grands ensembles, la frontière) que par une posture située et engagée.
Le séminaire sera adossé cette année à une journée d'études sur la géographie coréenne qui aura lieu le jeudi 28 ou le vendredi 29 mars (date à préciser à la rentrée). La présence à la journée complète sera obligatoire pour la validation.
Ce séminaire est accessible sur la plateforme d'enseignement de l'Environnement numérique de travail de l'EHESS :
Mots-clés : Développement, Espace, Espace social, Géographie, Urbaines (études), Ville,
Aires culturelles : Asie, Asie orientale, Corée,
Suivi et validation pour le master : Bi/mensuel annuel (24 h = 6 ECTS)
Domaine de l'affiche : Géographie
Intitulés généraux :
Renseignements :
Valérie Gelézeau par courriel.
Direction de travaux d'étudiants :
sur entretien, après envoi d'un pré-projet (2 pages maximum), et d'un CV.
Réception :
sur rendez-vous.
Niveau requis :
L ou équivalent. La pratique du coréen est très vivement recommandée mais n'est pas obligatoire.
Adresse(s) électronique(s) de contact : gelezeau(at)ehess.fr
En 2018-2019, mon séminaire a introduit le nouvel intitulé de mon enseignement : Géographie culturelle de la Corée. L’intitulé antérieur « La Corée : territoires et sociétés de la longue partition » n’était plus approprié à ma perspective qui, à partir de mes travaux sur les relations inter-coréennes [1], m’a conduite à développer une analyse anthropologique de la frontière coréenne induisant une approche beaucoup plus globale de cette (ou de ces) sociétés(s).
Depuis une dizaine d’années, mes recherches sur la division coréenne soulignent combien la frontière séparant la République de Corée (Corée du Sud, société aujourd’hui développée, post-industrielle et démocratique) et la République populaire démocratique de Corée (Corée du Nord, état totalitaire qui se dit socialiste et connaît depuis le début des années 1990 une grave crise de développement) contredit les images médiatiques ou savantes d’une limite figée dans le temps et l’espace de la Guerre froide. Au contraire, à l’image d’une faille active de l’écorce terrestre, elle est perpétuellement en construction.
Les premières séances du séminaire ont donc discuté la situation-même de mon enseignement, dans une problématique centrale qui est celle de la polarisation implicite de la « méta-culture » ou « méta-nation » coréenne. En effet, il est impossible de se situer « en Corée », sans expliciter une position soit au Sud soit au Nord, en raison de la difficulté de nommer « la Corée entière » en coréen. En Corée du Sud, « Corée » se dit Han’guk. En Corée du Nord, « Corée » se dit « Chosŏn ». Aucun terme vernaculaire nord- ou sud-coréen ne rend l’idée de « Corée » qui renvoie à la longue durée d’une culture ancrée dans cette péninsule asiatique aujourd’hui divisée. Les deux formes contemporaines de la langue coréenne expriment la polarisation et les frontières mentales qui caractérisent l’étude de la Corée et impliquent de prendre conscience que la plupart des faits sociaux analysés sont formés, et informés, par le système de la division.
Dans cette perspective fondamentale, impliquant aussi une réflexion de nature épistémologique sur la notion même d’aires culturelles aussi bien que sur la géographie culturelle en tant que branche assez récente de la discipline, j’ai travaillé dans deux directions avec les étudiants assistant à mon séminaire (cinq étudiant·e·s du master AMO, 4 doctorantes de l’EHESS inscrites sous ma direction dans ma mention Territoires, sociétés, développement).
La première nous a conduits à questionner Séoul comme capitale de l’archipel des capitales plurielles de la péninsule, en suivant la structure de mon livre de 2010 sur cette ville [2], afin de re-travailler la bibliographie, aussi bien que les matériaux primaires utilisés, à l’aune des évolutions de la recherche sur les questions urbaines en Corée du Sud.
La seconde direction a consisté dans la préparation et la valorisation d’une journée d’études organisée le 20 mars 2019 en partenariat avec le Centre de recherches sur la Corée de l’EHESS : Nouvelles géographies coréennes en perspectives (New perspectives on Korean geographies) avec les communications de Bae-Gyoon Park (Université nationale de Séoul, professeur invité de l’EHESS en 2018-2019), Jamie Doucette (Université de Manchester) et Hyun-Bang Shin (London School of Economics), invités par les petites invitations de l’EHESS. À l’occasion de cette journée, j’ai présenté avec une de mes doctorantes, Suzanne Peyrard, une première version d’un article actuellement en cours d’évaluation pour une revue internationale d’études coréennes, que nous avons également présenté lors de la conférence de l’AKSE (Association for Korean Studies in Europe) à Rome : « Moving scales of an urban mega-project in Songdo : digitalized power and the fabric of a new residential space » (Les échelles mouvantes d’un méga-projet urbain à Songdo : pouvoir digital et fabrique de nouveaux espaces résidentiels).
[1] Valérie Gelézeau, « Espoirs et désillusions de la décennie du “rayon de soleil” », Critique internationale, octobre-décembre 2010, Thema « Coopérations coréennes, 1998-2008 », p. 9-20.
[2] Valérie Gelézeau, Séoul mégapole, Paris, Autrement, 2010.
Publications
Dernière modification de cette fiche par le service des enseignements (sg12@ehess.fr) : 20 novembre 2018.