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Mardi de 16 h à 19 h (salle AS1_24, 54 bd Raspail 75006 Paris), du 6 novembre 2018 au 12 mars 2019. Pas de séance le 4 décembre
Quel est votre sujet ? L’étudiant est perdu. On lui dit qu’il faut problématiser, mais on ne lui apprend pas comment. Un sujet est un contrat annuel (mémoire) ou pluriannuel (thèse), il vaut mieux ne pas se tromper. Il n’est pas seul dans le désarroi. Des scientifiques chevronnés passent des années en quête de la bonne question. Nombreux ne la trouveront jamais ou, plus courant, confondront problème et objet. C’est cela, le risque : travailler sur un corpus, une époque, un phénomène, un personnage, comme s’il s’agissait d’un problème scientifique. Or être seiziémiste ou Proustien n’a pas de sens en science. Le 16ème siècle et Marcel Proust ne sont pas des questions, par contre ils peuvent servir de support à un questionnement. Qu’on se le dise : Au commencement était la question ; l’objet est venu plus tard et lui est subordonné. L’objet de recherche doit être à la fois exemplaire et heuristique ; il s’ensuit que la plupart des cas étudiés sont de mauvais exemples, à ignorer. Et qu’en est-il du contre-exemple ? Ce séminaire proposera des outils pour poser des questions et pour identifier des cas permettant d’y répondre – et de questionner les réponses. On s’inspirera de la biologie qui, comme nous, étudie le vivant.
1. Faire problème, prendre en exemple
François Jacob, prix Nobel de biologie, écrit que « le scientifique navigue entre deux pôles : le désirable et le possible. Sans possible, le désirable n’est qu’un rêve. Sans désirable, le possible n’est qu’ennui ». Comment distinguer les deux ? « Les scientifiques s’attaquent à ce qui leur semble le plus important parmi les problèmes qui leur sont accessibles ; c’est-à-dire ceux qu’ils ont, à tort ou à raison, l’impression de pouvoir résoudre. » En Biologie, une question n’est acceptable que si elle peut être résolue en laboratoire.
Les sciences de l’homme ne disposent pas de tel garde-fou. Nous avons choisi cette vocation parce que nous sommes habités par des questions existentielles qui sont par définition difficilement solubles. En sciences dures, on n’est chercheur que si on a bon espoir de devenir trouveur. « Aucun chercheur n'est jamais parvenu à acquérir la moindre notoriété en ne trouvant rien » (Jacob). En sciences soft, le leitmotiv est « chantier ». Historiens, sociologues, philosophes ne disent jamais « la question est résolue, passez à autre chose ». Or nous aussi, on veut trouver de temps en temps. Le séminaire se veut atelier d’alchimie ; on y proposera des procédés à même de transmuter le désirable en soluble.
« Pour s’attaquer à un problème important, continue Jacob, pour avoir une chance raisonnable de lui trouver une solution, » le biologiste doit se procurer un organisme modèle adéquat. Un organisme modèle est un animal ou une plante qu’on manipule pour comprendre des phénomènes généraux. Chaque discipline a son propre organisme modèle. Aristote a fondé les études embryonnaires sur la poule. La drosophile a rendu de fiers services à la cartographie des chromosomes. L'Escherichia coli (notre microbe intestinal) a craché la clé de la régulation génétique. L’expérimentation sur des humains est interdite, alors on procèdera par analogie. Chaque problématique en sciences sociales et humaines mérite un objet de recherche consensuel – un cas modèle. Pour ce faire, le séminaire se transformera en site de rencontres entre questions et cas.
2. Classiques de la philosophie naturelle
On privilégiera des thèmes pertinents aux sciences de l'homme. Chez Lamarck, on s'intéressera à la tension entre lois et milieu. De la boîte à outils de Charles Darwin, on empruntera le présent comme clé du passé. Claude Bernard sera représenté par la théorisation de la science expérimentale et par la définition de la vie à travers le milieu intérieur. William Bateson (le père de Gregory) est le chantre du vivant comme variations sur des thèmes. François Jacob et Jacques Monod ont introduit le contexte dans la biologie moléculaire. Contre le fonctionnalisme, Motoo Kimura a imposé l'ubiquité des mutations neutres, i.e. ni bénéfiques ni nuisibles. Stephen Jay Gould a ébranlé l'édifice évolutionniste avec l'équilibre ponctué, théorie qui véhicule une vision de l'histoire du vivant comme un océan quasi-statique avec des îlots de changement.
Mots-clés : Agriculture, Biologie et société, Comparatisme, Enquêtes, Épistémologie, Génétique, Histoire des idées, Histoire des sciences et des techniques, Méthodes et techniques des sciences sociales, Philosophie, Pratiques, Savoirs, Sciences,
Suivi et validation pour le master : Hebdomadaire annuel (48 h = 2 x 6 ECTS)
Domaine de l'affiche : Philosophie et épistémologie
Intitulés généraux :
Site web : http://www.TooMuch.Us
Site web : http://WWW.DanielMilo.com
Adresse(s) électronique(s) de contact : dsmilo(at)gmail.com
Dernière modification de cette fiche par le service des enseignements (sg12@ehess.fr) : 22 novembre 2018.