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Vendredi de 11 h à 13 h (salle de réunion, CRAL, 1er étage, 96 bd Raspail 75006 Paris), du 30 novembre 2018 au 14 juin 2019. La séance du 7 décembre se déroulera de 9 h à 11 h (salle 9, 105 bd Raspail 75006 Paris). La séance du 1er mars est annulée. Les séances des 7 et 14 juin se dérouleront de 10 h à 13 h
Les définitions que nous donnons habituellement du phénomène de l’ironie sont soit trop spécifiques, soit trop générales ; parfois ces définitions ne font que décrire le phénomène, parfois elles se tiennent aux classements traditionnels sans rien ajouter.
Nous proposons, pour éviter de tomber dans ces impasses d’approximation, d’aborder ce sujet en partant de ces questions : pourquoi l’ironie, si elle n’avait d’autre intention que la moquerie antiphrastique ? Pourquoi dire quelque chose de façon oblique et indirecte, si l’on pouvait le dire également de manière directe ? En d’autres termes, notre perspective verra l’ironie comme un processus et une attitude qui cache un surplus communicationnel, un processus nécessairement intersubjectif : nous allons essayer de définir l’ironie en termes de distance et réflexivité.
Le séminaire se composera de trois étapes : en partant de l’appui de l’analyse de textes (notamment littéraires, comme Le Rouge et le Noir de Stendhal), nous allons proposer une définition bien ancrée dans la signification argumentative intérieure aux mots ; ensuite, notre attention sera consacrée à l’étude des nombreuses représentations narratives possibles du processus ironique ; enfin, à nouveau au moyen de ces excursus littéraires, nous allons vérifier nos propos théoriques et, surtout, nous allons constater l’importance de l’Autre et du rapport de ce dernier à la subjectivité dans toute tentative de définition du phénomène ironique.
Mots-clés : Linguistique, Littérature, Philosophie, Psychanalyse,
Suivi et validation pour le master : Hebdomadaire annuel (48 h = 2 x 6 ECTS)
Intitulés généraux :
Renseignements :
Par courriel.
Niveau requis :
Aucune connaissance préalable n'est démandée.
Adresse(s) électronique(s) de contact : emiliano.cavaliere(at)ehess.fr
Le séminaire a été consacré au phénomène de l’ironie, à sa définition et à ses fonctions. Il existe un nombre étonnant de descriptions, théories et opinions la concernant, provenant de domaines fort éloignés et distincts les uns des autres ; pour autant ceux-ci ne peuvent prétendre offrir beaucoup plus que des distinctions fixes et arbitraires (si bien que les frontières mêmes du phénomène de l’ironie, ne sont pas du tout claires. Il s’avère en effet impossible de distinguer nettement l’ironie de l’humour, du mot d’esprit ou du sarcasme). Le cours s’est donc donné pour but non pas de formuler une énième opinion partiale, mais de tenter d’offrir aux étudiants un regard général sur les différentes manières d’aborder ce sujet à partir de champs disciplinaires divers, avec leurs avantages et leurs limites afin de leur donner les outils nécessaires à l’élaboration de leur propre réflexion. Ils ont ainsi pu choisir la tradition de pensée et la perspective disciplinaire la plus utile à leurs recherches personnelles. Dans ce but, aucune distinction nette n’a été avancée : l’ironie a été tout simplement présentée comme phénomène essentiel de l’expressivité humaine, ayant des traits métahistoriques et multiformes.
Les 24 séances ont été réparties en plusieurs thématiques : 1. La présentation des approches linguistiques de l’ironie, abordées dans une perspective chronologique à partir de l’approche antiphrastique, plus classique et encore hégémonique, du moins dans le sens commun (P. Fontanier, P. Grice, C. Kerbrat-Orecchioni), jusqu’aux singulières positions de l’approche énonciative, laquelle a révolutionné l’étude linguistique de l’ironie du tournant des années 1980 à nos jours (D. Sperber et D. Wilson, A. Berrendonner, O. Ducrot) ; 2. L’étude plus approfondie de deux articles, ayant trait à l’analyse de l’énoncé ironique, par Marion Carel (« Ironie, paradoxe et humour », 2011) et Oswald Ducrot (« Ironie et négation », 2010), offrant une méthode convaincante pour identifier l’énoncé de type ironique et le distinguer d’autres éléments inscrits dans la langue (comme le paradoxe) afin d’en saisir la signification et l’argumentation ; 3. La question de l’ « ironie romantique », avec sa caractérisation historique, son essence transhistorique et ses héritages contemporains, traitée notamment à la lumière des écrits de F. Schlegel (Fragments) et G. W. F. Hegel (Esthétique) et mise en rapport avec l’ironie socratique ainsi qu’à l’ironie des Lumières, enfin considérée dans le cadre plus vaste du filon philosophique de la critique de l’esthétisation des mœurs (J. Rebentisch, Die Kunst der Freiheit) ; 4. L’analyse de deux contributions relevant du domaine de la sociologie et du champ de l’anthropologie philosophique, « Role distance » (Encounters) de E. Goffman et Das Lächeln de H. Plessner, considérées dans leur opposition à la doctrine romantique de l’aliénation, dont Rousseau est un des modèles principaux ; 5. La présentation générale de l’approche psychanalytique de l’ironie, exemplifiée notamment par la référence à Le mot d’esprit de S. Freud et aux développements que F. Orlando, en Italie, en a proposé dans le champ de la théorie littéraire et de la littérature comparée.
Une séance du séminaire a accueilli un invité, Tomas Koblizek, chercheur à l’Institut de Philosophie de l’Académie Tchèque des Sciences (Prague), sur la perspective de la philosophie analytique sur l’ironie (H. Clark, G. Currie, R. Gerrig, R. Giora, Sperbre et Wilson). Quelques séances ont été dédiées aux exposés oraux des étudiant.e.s et à la discussion de leur travail de validation (un exposé s’est ainsi attaché à distinguer l’ironie et le registre grotesque ; un autre s’est occupé de présenter l’ouvrage d’Ironie et modernité de E. Behler). Enfin, quelques séances ont été consacrées à l’exposition du travail de recherche du responsable du séminaire, se fondant sur l’hypothèse de l’existence d’une subjectivité « ironique » moderne (reconnaissable dans Le Rouge et le Noir de Stendhal), à la fois « fille » et alternative à la subjectivité « authentique » (dont l’archétype est repérable chez Rousseau). Enfin, 16 heures complémentaires ont été dédiées à l’aide individuelle à la recherche, dispensé sur rendez-vous.
Dernière modification de cette fiche par le service des enseignements (sg12@ehess.fr) : 21 mai 2019.